Conseil d'ÉtatLa jurisprudence Czabaj, dégagée en 2016 par le Conseil d’État, n’en finit plus de trouver de nouvelles applications. Dernières victimes en date : les autorisations d’urbanisme.

Le 13 juillet 2016, l’assemblée du contentieux de la plus haute juridiction administrative introduisait le délai raisonnable de recours. En substance, le principe est d’assurer un équilibre – délicat à rechercher – entre la légalité et la sécurité juridique. Mais d’aucuns disent qu’il s’agit plutôt de sacrifier la première sur l’autel de la seconde…

Cette jurisprudence Czabaj, du nom du brigadier de police à l’origine de cette décision, fixe le principe selon lequel le destinataire d’une décision administrative ne peut exercer de recours contentieux au-delà d’un délai raisonnable qui, de manière générale, ne saurait excéder la durée d’un an.

L’instauration d’un délai de recours de nature prétorienne est on ne peut plus critiquable. Surtout lorsque ce délai a vocation à s’appliquer progressivement à tous les champs du contentieux administratif.

C’est ainsi que le 9 novembre 2018 (n° 409872) le Conseil d’État a décidé d’étendre la jurisprudence Czabaj aux recours juridictionnels dirigés contre les autorisations d’urbanisme. Le considérant de principe est ainsi rédigé :

« Considérant que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d’aménager ou un permis de démolir ; que, dans le cas où l’affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l’article R. 424-15 du code de l’urbanisme, n’a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l’article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l’article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d’affichage sur le terrain ; qu’en règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable ; qu’il résulte en outre de l’article R. 600-3 du code de l’urbanisme qu’un recours présenté postérieurement à l’expiration du délai qu’il prévoit n’est pas recevable, alors même que le délai raisonnable mentionné ci-dessus n’aurait pas encore expiré ; »

En clair, le tiers dispose d’un délai de deux mois à compter de l’affichage de l’autorisation d’urbanisme pour contester cette décision devant le juge administratif. Mais lorsque ce délai n’est pas mentionné sur le panneau d’affichage, apparaît alors le principe de délai raisonnable qui oblige le tiers requérant à introduire son action dans l’année qui suit le premier jour de la période d’affichage.

Cette nouvelle application de l’arrêt Czabaj s’inscrit dans la tendance de fond qui vise à protéger et sécuriser autant que possible les opérations de construction. Au détriment de la légalité, seule garante de l’État de droit…

 

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